L’industrie de la pêche en Basse-Côte-Nord s’inquiète des menaces tarifaires des États-Unis
Écrit par Frédérique Lévesque le 12 février 2025
L’imposition de tarifs douaniers de 25% pour les importations canadiennes en sol états-unien, prévue dans moins d’un mois, aurait un impact bien concret pour la Basse-Côte-Nord, en affectant directement les exportations des produits de la pêche. C’est ce que nous explique Julie Monger, directrice de l’Association des pêcheurs de la Basse-Côte-Nord.
La directrice de l’Association rappelle que la plus récente chute du prix du crabe avait particulièrement affecté les pêcheurs de la région. De 2022 à 2023, le prix moyen du kilogramme de crabe des neiges était passé de 15,56$ le kilogramme en 2022 à 5,05$ le kilogramme en 2023, selon l’Institut de recherche en économie contemporaine, l’IREC. Cela était dû à la saturation du marché du crabe des neiges aux États-Unis, lieu principal d’exportation du produit pour la région, et au pouvoir d’achat des consommateurs, qui avait diminué simultanément.
L’Institut de recherche en économie contemporaine indique que 93% des exportations internationales du crabe des neiges au Québec sont destinées aux États-Unis. Ce pourcentage est similaire pour les autres espèces et tourne autour de 90%, selon Julie Monger.
Le développement de nouveaux marchés serait une avenue possible pour répondre à l’imposition tarifaire américaine. Cette volonté de créer de nouveaux partenariats, à l’extérieur des États-Unis, n’est pas nouvelle pour l’Association des pêcheurs de la Basse-Côte-Nord, explique la directrice de l’organisation.
Les Fermes Belles Amours, une entreprise située à Blanc-Sablon qui se spécialise depuis 2021 dans l’exportation de homards vivants, exporte déjà ses produits vers la Chine, à travers un partenaire du Nouveau-Brunswick.
Micheal Sheppard, le propriétaire de l’entreprise, nous explique que malgré qu’il dépende d’un autre marché que les États-Unis, l’imposition de tarifs douaniers impacterait quand même les prix du marché chinois. Il explique que la moitié du homard canadien est exporté aux États-Unis, l’autre moitié, en Chine. Les entreprises se retourneront donc plus aisément vers le marché chinois, qui risque de saturer, impactant la valeur marchande du produit.
L’exportation sur le marché asiatique ne prémunirait donc pas totalement l’entreprise de Blanc-Sablon des impacts de l’imposition d’un tarif douanier américain.

L’ajout de tarifs douaniers sur les importations canadiennes aux États-Unis aurait aussi un impact sur la capacité d’achat des produits canadiens par les Américains, faisant en sorte que l’offre dépassera la demande. Les consommateurs américains se retourneront probablement vers le marché local.
Pour ce qui est du développement du marché local québécois, cela ne serait pas une alternative viable pour l’instant, selon la directrice de l’Association des pêcheurs de la Basse-Côte-Nord.
En effet, les consommateurs québécois sont peu à répondre présents comme acheteurs de produits de la pêche locale. Selon Julie Monger, cela s’expliquerait entre autres par une méconnaissance des variétés du Saint-Laurent et par des habitudes alimentaires qui ne sont pas orientées vers les produits locaux.
Plusieurs acteurs de l’industrie de la pêche en Basse-Côte-Nord attendent d’avoir la confirmation que les tarifs douaniers impacteront directement leurs exportations, avant d’entreprendre des actions concrètes.
La prochaine étape avant de se mobiliser comme Association sera d’abord de connaître les quotas des zones dans lesquelles pêchent les membres de l’Association. Les valeurs marchandes sont déterminées à Boston, lors du salon nord-américain, de commercialisation des produits marins, le Seafood Expo North America, qui aura lieu en mars prochain. C’est à la suite des décisions prises lors des discussions entre les acteurs de l’industrie que l’Association des pêcheurs de la Basse-Côte-Nord pourra saisir la mesure des impacts des tarifs douaniers sur les pêcheurs de la région.
Malgré les inquiétudes palpables au sein de la principale industrie de la région, la directrice de l’Association des pêcheurs de la Basse-Côte-Nord ne perd pas espoir.